Et voilà le grand jour arrivé. Après plusieurs mois de préparation, le "Team Granit" se retrouve samedi soir dans les environs de Limoges.
Bastien est venu de son côté pendant que nous faisons voiture commune avec Benoit et Olivier. Nous nous installons au Campanile, l'endroit est sympa, ça commence bien. Il y a du monde dans les restos ce samedi soir dans la banlieue de Limoges, plus de place dans les pizerrias, nous choisissons finalement de dîner au Courte Paille, avec double ration de pâtes. On se couche à une heure raisonnable et après une bonne nuit, lever à 6h30 pour prendre le petit déjeuner à l'hôtel qui est censé être servi à partir de 7h. Gros doute lorsque nous voyons l'endroit désert et tout sombre alors qu'il est 7h05. On finit par appeler le N° d'urgence qui nous permet de réveiller l'équipe de l'hôtel qui a loupé le réveil. Pas glop du tout, ça tombe mal, gros carton rouge au Campanile. Heureusement, j'ai un bout de gâteau "JP Stephan" ( merci pour la recette ) que j'ai amené avec moi, je le dévore pendant que Benoit et Olivier mangent des barres céréales et des gâteaux à la noix de coco. On part un peu stressés, ce n'est pas le démarrage idéal.
On arrive à Saint-Sylvestre un gros quart d'heure plus tard. On sort les vélos, j'ai amené une pompe à pied au cas où. Olivier s'en empare pour donner un coup au pneu arrière. Et là, scénario catastrophe, la valve tubeless lui reste dans la main ! "Pas grave, nous dit-il, Benoit, tu peux me passer les chambres que j'ai laissé chez toi?" "Euh .... " Chambres laissées dans le garage en partant. Olivier en sort une de son camel : raté, c'est une grosse valve. Là, ça sent mauvais. Mais Saint-Michel dépannage veille, j'avais pris deux chambres au cas où, j'en donne une à Olivier et on part chercher les plaques pendant qu'Olivier répare. Il nous rejoint peu après, c'est un peu mouvementé ce matin mais on gère. Bastien nous attendait, on a le temps de boire un café et on regarde partir le championnat SNCF à 8h30 avant de se placer sur la grille.
On aperçoit M. et Mme Pedalator quelques mètres devant ainsi que JP Stephan avec son maillot de champion du monde masters en 1ère ligne. Un vététiste a un souci de cales de chaussures, l'organisation lance un appel sympa pour le dépanner. Ce sera une constante tout au long de la journée : sans nul doute l'équipe d'organisation la plus conviviale que j'ai eu l'occasion de voir, difficile de faire mieux. 8h45, nous sommes sur la grille, la troupe s'élance. Il y a un crash devant moi, je me retrouve bloqué à pied pendant quelques secondes. Je peux enfin repartir. On monte 300m sur la route puis on bascule pour la première descente, le ton du parcours est donné : ça monte fort ou ça descend fort, il n'y pas d'autres alternatives au programme.
Première descente raide dans la terre de bruyère humide. Beaucoup de monde sur les premiers passages techniques. Je découvre rapidement que mon pneu avant est inadapté à ce terrain humide : pas assez d'adhérence latérale, chaque prise d'appui est une aventure avec le pneu qui menace de ripper. Je serre les fesses pendant cette descente qui ne me donne pas du tout confiance. Je vais traîner ce handicap psychologique pendant tout le parcours, le niveau technique avec l'état du terrain est totalement hors norme, jamais vu l'équivalent sur les autres grands évènements où nous avons participé avec Benoit. Et pour corser le tout, il fait humide en ce début de matinée, mes lunettes se couvrent rapidement de buée dès que je ralenti, rendant la visibilité vers l'avant aléatoire. Tout est passable sur le vélo ou presque mais encore faut-il pouvoir le faire. Quelques chutes impressionnantes devant moi ne contribuent pas à restaurer ma sérénité. Heureusement, ça va beaucoup mieux dans les ascensions qui sont longues et raides mais qui passent bien hormis la répétition qui finit par user.
Avec la bousculade du départ, j'ai perdu tout le monde de vue. Bastien a filé devant, mais où sont Benoit et Olivier ? Finalement, après un petit saut de chaîne qui m'oblige à mettre pied à terre, Benoit revient. Le premier ravito arrive après 16km et une belle descente difficile à négocier où le concurrent devant moi percute un arbre dans les derniers mètres. On repart alors qu'Olivier arrive, il ne faut pas perdre de temps avec la porte horaire à franchir. La pluie de la nuit a rendu le parcours vraiment humide. Non seulement les descentes sont glissantes, mais il y a régulièrement quelques beaux bourbiers bien profonds qu'il faut éviter autant que possible. Néanmoins, la boue est liquide, donc ça passe sauf que ça mouille parfois bien les chaussures. L'enchaînement des montées et descentes techniques est absolument incroyable. Un truc de malade, j'étais pourtant prévenu mais j'étais loin d'imaginer que la difficulté pourrait être à ce niveau. Pour les vététistes de la région parisienne, c'est assez simple : vous prenez l'Hivernale de Larchant en multipliant le dénivelé par trois, la longueur des descentes et des montées par dix, vous ajoutez quelques ruisseaux et marécages, de la tourbe mouillée et glissante et vous avez une petite idée du parcours de la Granit Montana. Je ne parle pas du 100km de la JR, aimable balade champêtre en comparaison. La forme étant moyenne aujourd'hui, je passe rapidement en mode économique avec pour unique idée celle d'arriver au bout en passant la porte dans les temps.
Dans la longue montée avant le 2ème ravito, les jambes commencent à bien tourner et j'arrive en forme au sommet , retrouvant Benoit qui m'attendait en se restaurant. Nous repartons rapidement alors que le soleil commence à bien chauffer. Les paysages sont magnifiques sur cette partie, avec quelques descentes un peu plus roulantes qui permettent de récupérer un peu même si le granit local s'occupe de vous secouer comme un prunier. En voulant passer à pieds un passage particulièrement délicat dans une autre descente vertigineuse, je glisse et dévale toute la pente sur les fesses avec le vélo dans les mains sous l'oeil médusé des autres concurrents totalement admiratifs devant cette technique de descente inhabituelle mais très efficace. Je tente de me diriger avec les pieds, merci aux enfants pour l'entraînement en luge cet hiver ! Je crois ma dernière heure arrivée, mais non, même pas, je me relève prestement en bas et continue comme si de rien n'était :-).
Et voilà le km 37 et la bifurcation 56/76 qui fait office de contrôle de passage pour finir le grand parcours, on passe largement dans les temps avec plus de 45 minutes d'avance. Yes ! Le plus dur est fait me dis-je tout en me demandant qu'elle idée j'ai eu de m'inscrire à cette épreuve de cinglés. C'est le meilleur passage pour moi. Je me sens de mieux en mieux et je remonte pas mal de concurrents dans les bosses. L'entraînement paie, je ne me sentirai jamais vraiment en difficulté dans les parties montantes, qui sont à 99% montables hormis quelques courts passages de portage obligatoire. Par contre, j'en bave toujours dans les descentes avec ce putain de pneu avant qui n'a aucune adhérence latérale sur le mouillé. Je me paie une superbe gamelle dans un passage le long d'un grillage, une racine en travers et le vélo se couche violemment avec un pied qui reste clipsé me forçant à un quasi grand écart. Ouille. Je me relève tant bien que mal. Puis on traverse une tourbière sur 200m, terrible ! Soit on essaie de passer à vélo avec la roue avant qui s'enfonce de 20cm, soit à pied avec de l'eau jusqu'au mollet.
Je reviens sur Benoit dans la dernière ascension et nous arrivons ensemble au ravito 3 situé au km 48 au sommet du spot de DH local avec force modules en bois tout autour. Au menu, saucisson, sandwichs, coca, fromage et un accueil au top par une jeune femme aussi charmante que gentille qui fait de son mieux pour nous réconforter pour la suite du parcours. A juste titre, parce-que la suite, c'est l'enfer ! Pendant presque 20 bornes, on va alterner descentes de folie, traversée de marécages au milieu de nulle part sur des sentiers défrichés pour l'occasion, ou sous le cagnard, un concentré de tout ce qui fait le VTT. Dans les descentes, j'essaie toutes les techniques : sur le vélo, sous le vélo, à coté du vélo à droite ou à gauche, par-dessus le vélo, sur le dos, le ventre ... Je ne compte plus les chutes, mais toujours en douceur. Le tracé est magnifique, mais le problème c'est l'intensité du dosage. Hallucinant ! Le clou de ce passage, c'est le signaleur qui m'annonce à une intersection : "ravito à 800m et arrivée à 14km,, courage!" . Youpi me dis-je, un ravito. Je le voyais plus loin pourtant. Il faut escalader le lit d'un ruisseau pour commencer. Puis ça monte en forêt. Ca monte, ça monte .... 1/2h plus tard, toujours pas de ravito et pour cause, je mettrai 45 minutes en tout à l'atteindre avec des morceaux d'anthologie. Il paraît qu'un avis de recherche a été lancé par une association de concurrents pour retrouver le signaleur farceur :-)
Toutes les difficultés du parcours sont signalées par une petite pancarte sympa avec des noms évocateurs : "la montée des sangliers", "la descente du castor", "la grimpette du Canyon" ... Dans un des rares chemins a peu près plats, j'évite un bourbier par la droite. Hélas, je n'avais pas vu un énorme trou caché par les herbes. Le vélo disparaît dedans pendant que je finis le nez dans le bourbier. Pfuiiiiii .... Dur, dur ! Je suis usé par le coté sans répit du tracé. Pas question de renoncer, même si dois ramper avec le vélo sur le dos, je ramperai jusqu'à l'arrivée. Je tiens à cet objectif que nous avons longuement préparé et puis j'ai une pensée pour des proches malades qui comptent sur moi pour montrer l'exemple et ne rien lâcher. Raaahhhhhhhh ! A l'attaque, on repart ! Benoit a disparu devant, plus grand monde de visible autour de moi. Je n'ai pas mal aux jambes, mais je manque désormais de force et je suis obligé de mettre pied à terre dans les forts pourcentages, en montée, comme en descente d'ailleurs, la lucidité commençant à baisser, j'opte pour la prudence.
Au détour d'une énième descente infernale, je tombe sur un panneau "arrivée 10km" . Ca me rebooste. Et le ravito arrive quelques centaines de mètres plus loin. Je me jette sur le coca et le saucisson, prend le temps de bien manger et boire. Je me sens beaucoup mieux en repartant. Un peu plus loin, deux concurrents qui ont l'air tout frais me rattrapent. D'où viennent-ils ? En fait, c'est l'équipe qui ... ferme le parcours. Mais, où sont passé tous les autres ? Il y a eu pas mal de déchet et me voilà le dernier en course. Mince alors ! La compagnie de mes deux "fermeurs" me fait du bien, j'arrive à maintenir un rythme honorable, bien meilleur que sur le tronçon précédent. Le terrain a séché et le Mountain King avant retrouve de l'adhérence ce qui me permet de descendre enfin sans me faire de trop grosses frayeurs. En fait, ça descend si bien que je rate une bifurcation ce dont je me rends compte en arrivant sur une route. Pourtant le parcours était impeccablement bien fléché. Un travail incroyable de l'organisation, je n'imagine pas le temps qu'ils ont du y passer. Il me reste plus qu'à remonter, histoire d'augmenter un peu le D+ :-) . Et zut, j'ai perdu mes poissons pilotes. Je retrouve le parcours ( ça monte ! ) , arrive la dernière descente où j'entends la sono de l'arrivée. Je manque deux ou trois fois de passer par dessus le vélo. J'entends soudain un "pshhhiiiitt" à l'arrière mais le latex fait son effet et le trou se bouche rapidement.
J'arrive donc en bas où je retrouve l'équipe de fermeture du parcours qui s'inquiétait de ma disparition. Super sympa les gars. Le signaleur du bas de la descente prévient l'arrivée par radio : "il arrive ! ". Pour finir, il reste bien entendu une dernière bosse infernale, ici, c'est dur jusqu'au bout. Ca monte raide, avec des caillasses et de l'eau. A ma grande surprise, je vois apparaître Olivier puis Bastien puis plein de monde qui descend de l'arrivée pour m'encourager. Ca tape des mains, ça applaudit, il y a des gamins qui courent à coté de moi en criant des encouragements. Incroyable, ça ne m'est jamais arrivé un truc pareil. Je donne tout ce qu'il me reste pour monter cette foutue côte sur le vélo. Pas question de poser le pied maintenant. Ca rippe, ça tabasse, je me bats, il reste 200m parait-il puis 100m puis 30m, et je débouche sur la pelouse, il y une haie d'honneur sous la banderole, avec Benoit et tout le monde qui m'encourage. Géant ! Evidemment, il y a un belle butte juste avant la banderole. Je la passe sur l'élan, ligne franchie. Je l'ai fait ! Yeeeeessssssss ! J'ai le droit à l'interview au micro et l'organisation m'offre l'inscription pour 2013. Enorme ! Décidemment, ils sont trop sympas ici. Il ne reste plus qu'à s'entraîner aux descentes hyper raides dans la terre de bruyère et surtout à revoir la monte avant sur ce terrain en cas de pluie. De très loin la course la plus dure que j'ai jamais faite. Un parcours de folie, une organisation exceptionnelle aux petits soins pour les concurrents, un terrain dur et technique complètement hors norme, une ambiance hyper conviviale.
Au final, un souvenir exceptionnel que je ne suis pas prêt d'oublier. Avec mes petits détours, le GPS indique au retour 75km et 3150m de D+, 8h47 de roulage et 9h55 au total (!). Il ne reste plus qu'à s'entraîner pour l'année prochaine et cette fois, on revient en force.
12 commentaires:
Superbe CR, en tout point d'accord avec toi sur la difficulté de l'épreuve et l'organisation au top !
Bienvenue à Granit'Land, le paradis du sanglier ;-)
Bravo pour ton aventure, le CR et d'avoir été jusqu'au bout sans lâcher.
Comme je l'ai écrit à l'issu de la 1ère édition, "Le Granit se mérite",
tu as pu juger sur place que cela reste d'actualité,
l'épreuve ne cessant de s'améliorer chaque année, au niveau de l'organisation
comme au niveau du tracé qui en offre encore plus à chaque édition : plus de descentes superbes techniques/ludiques, contrepartie du D+ en augmentation, plus de sentiers recherché et/ou défriché par Aurélien et ses sbires.
C'est pas une épreuve de malade, ya pire...là on en prend plein les cuisses, mais pour peu d'avoir un peu d'entraînement on ne s'y ennuie jamais et le plaisir est au RDV pour les vrais VéTéTistes.
Bonne récup ;-)
Pédalator
PS: Mountain King avant en 2.1" ça tiens très bien le parquet là-bas, mais gonflé à 1.6/1.8 pour la version UST.
Un grand bravo à notre JP qui, une fois de plus, force le respect.
Vous auriez du le voir sur la dernière côte (et pas des moindres), sur le vélo jusqu'en haut !
Bastien
Et pourtant, il était bien gonflé à 1,7 bar ce Mountain King. C'est la nouvelle version RaceSport en 2.2. Je persiste à avoir un gros doute sur l'efficacité des crampons latéraux, mais peut-être bien que c'est dans la tête. Dans le doute, pour l'année prochaine, ce sera un Toro ou un Nobby Nic devant.
Bravo à l’équipe pour cette belle performance.
Super compte rendu, ça donne l’impression d’y être.
Si le terrain est aussi joueur que l'hivernale voir plus, je pense que je vais me laisser tenter pour la prochaine édition, sauf si ça tombe au même moment que terre noire.
A bientôt
Xavier
On a souvent pensé à toi Xavier, ce terrain est fait pour toi, tu te serais régalé !
Je confirme. Des marches et passages qui frottent les pédales, il y en avait à la pelle. Un vrai régal pour un casse-coup comme toi.
L'an prochain on t'emmene dans nos valises :-D
Bastien
bonjour,
beau compte-rendu.
nous sommes retrouvés sur le même parcours et avons profité du ravito n° 3.
ravi de lire que tu es arrivé en "héros" sur ce parcours incroyable.
a bientôt
ludovic du club de l'yvette
Je me souviens bien de t'avoir croisé au ravito. Tu pestais après le passage dans le marécage :-) Beau souvenir que cette Granit. Rendez-vous pour l'édition 2013.
Bravo Jean-Pierre et le Team Montana de St Michel !!!
Quelle aventure... Vous êtes vraiment des grands malades les gars.
Félicitations pour ta persévérance.
Franck
Coucou Franck, on a déjà prévu de t'inscrire de force pour 2013 :-)
Le VTT c'est géant, il n'y a pas de meilleurs sports.
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